Mi-juin, la Securities and Exchange Commission (SEC) a déposé une plainte détaillée contre Binance Holdings Limited, ainsi que plusieurs de ses filiales et son propriétaire, Changpeng Zhao. Selon la SEC, l’entreprise aurait enfreint à plusieurs reprises les lois américaines sur les valeurs mobilières.
La SEC s’attaque sérieusement aux cryptomonnaies
Depuis des années, la SEC affirme que la régulation des cryptomonnaies est l’une de ses priorités. En 2022, elle a lancé 30 actions en justice liées aux cryptoactifs, soit 50% de plus que l’année précédente. Et sur les 6 premiers mois de 2023, elle est en passe de faire encore mieux avec une augmentation de plus de 25% du nombre de plaintes.
Lors d’une récente interview, Gary Gensler, le patron de la SEC, n’a pas mâché ses mots sur l’industrie des cryptomonnaies :
“J’ai vu des cas de non-respect des lois dans la finance traditionnelle, mais jamais à une telle échelle. Et franchement, c’est sur cela que repose le modèle économique d’une grande partie de l’industrie des cryptoactifs.”
Binance accusée de multiples infractions
L’action en justice contre Binance illustre comment la SEC s’attaque frontalement aux pratiques illégales présumées des acteurs des cryptomonnaies.
Elle assimile les fonctions et les acteurs traditionnels des marchés financiers à leurs équivalents dans l’univers crypto.
Ainsi, aux États-Unis, les courtiers et autres participants aux marchés de valeurs mobilières sont soumis à une réglementation stricte de la SEC. Ils doivent s’enregistrer auprès de l’autorité et respecter des obligations strictes.
Or d’après la plainte, Binance était parfaitement au courant de ces exigences mais aurait mis en place un vaste système pour dissimuler ses activités et sa clientèle aux États-Unis afin de les contourner.
De multiplesstratagèmes pour cacher ses clients américains
Au cœur des accusations, la manipulation du système de vérification d’identité (KYC) de la plateforme. Alors que Binance affirmait publiquement interdire les utilisateurs américains, elle les encourageait en privé à contourner ces restrictions via des VPN.
L’objectif ? Faire croire que ces clients se connectaient depuis l’étranger pour “minimiser l’impact économique” des annonces publiques.
D’autres stratagèmes présumés sont pointés du doigt :
- La possibilité pour certains gros clients américains de mettre à jour leurs données KYC pour supprimer tout lien avec les États-Unis
- L’absence d’obligation de vérification d’identité pour tous les utilisateurs jusque mi-2021
Des accusations passibles de lourdes sanctions
Sur la base de ces éléments, la SEC accuse Binance d’11 violations graves de la loi, notamment :
- Vente illégale de titres
- Exercice d’activité d’exchange, de courtier et d’agent de compensation sans enregistrement
- Responsabilité du dirigeant Changpeng Zhao
- Fraude boursière
La SEC a choisi d’intenter une action pour fraude boursière sur la base de la section 17(a)(2) du Securities Act de 1933, plutôt que via la section 10(b) du Securities Exchange Act de 1934 habituellement utilisée.
En invoquant la section 17(a)(2), la SEC n’a pas à prouver une intention frauduleuse (« scienter »). Une simple négligence suffit pour établir la fraude. Ce choix stratégique marque la volonté de sanctionner plus facilement les acteurs peu scrupuleux.
L’issue de cette affaire Binance / SEC sera suivie de près par tous les acteurs du secteur. Elle donnera une indication claire de la marge de manœuvre future des autorités américaines pour encadrer et réguler le Far West des cryptomonnaies.